Loi sur les langues officielles: Vers une première modification en 16 ans

R.J. Simpson, ministre responsable des langues officielles des T.N.-O.
Le ministre responsable des Langues officielles des T.N.-O., R.J. Simpson (Photo : Cécile Antoine-Meyzonnade)
Thomas Ethier - - YellowknifeTNO | 06-11-2020
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Le gouvernement TNO, a émis cette semaine trois recommandations de modifications à la Loi sur les langues officielles. L’annonce en a été faite le 2 novembre, lors de la comparution du ministre responsable des langues, R.J. Simpson devant le comité des Opérations gouvernementales des TNO qui procède, ce jours-ci, à l’examen de la Loi. Si ces amandements sont adoptées par l’Assemblée législative, ce sera la première fois depuis 2004 que la loi qui régit les 11 langues officielles du Territoire subit des modifications. 

Dans le cadre de ce processus de révision, qui a lieu tous les cinq ans, le comité constitué de députés a le mandat d’émettre ses propres recommandations quant à ce qui devrait, selon ses membres, être changé dans la Loi sur les langues officielles des TNO.

Toutefois, au terme des derniers exercices de révision, qui ont eu lieu en 2009 et en 2014, aucune des recommandations émises n’a été retenue, et la Loi est demeurée inchangée. 

Mises à jour « administratives » 

Cette année, comme l’a expliqué la directrice du Secrétariat à l’éducation et aux langues autochtones, Angela James, le ministère responsable des langues officielles propose de profiter de ce processus de révision pour apporter des « modifications administratives qui s’imposent depuis un certain temps ». Ces recommandations essentiellement cosmétiques incluent notamment la révision des règlements et des lignes directrices qui régissent les langues autochtones du territoire.

Le gouvernement TNO cherche également à mettre à jour les termes employé dans la Loi. Par exemple, on compte changer le nom de la langue « Esclaves du sud » par « Déné Zhatié », employé par plusieurs membres des collectivités de la région pour désigner leur langue. On compte également changer le terme anglais « aboriginal » par « indigenous » qui se traduisent tous deux en français par « autochtone »

On recommande finalement de fusionner le comité sur les langues officielles et le comité sur la revitalisation des langues autochtones. En pratique, cette fusion est effective depuis 2017, mais n’est toujours pas officiellement inscrite à la Loi.

Requêtes du comité

Ces propositions du gouvernement seront présentées aux membres de l’Assemblée législative, afin qu’un nouveau projet de loi, incluant ces amendements, soit adopté. Le comité sur les opérations gouvernementales souhaite également que ses propositions fassent partie de l’éventuel projet de Loi. Le député de Frame Lake et membre du comité, Kevin O’Reilly, a demandé au ministre s’il s’engageait, cette année, à inclure certaines recommandations du comité.

« Je ne peux pas m’engager à apporter des changements réclamés par le comité avant même d’en avoir pris connaissance. La décision finale revient aux membres de l’Assemblée législative », a répondu le ministre.

Ce dernier a aussi souligné que bien qu’elles n’aient pas été incluses à la Loi, plusieurs recommandations émises par le comité ces dernières années ont tout de même été prises en compte sous forme d’initiatives et de politiques diverses.

Le député de Yellowknife Nord, Rylund Johson, a quant à lui déploré que la Loi sur les langues officielles se concentre essentiellement sur l’offre de services, et qu’on y néglige ainsi la protection et la revitalisation des langues autochtones, dont certaines font face à une assimilation galopante. Selon lui, ce processus de révision ne devrait pas se limiter à la Loi sur les langues officielles, et devrait aussi inclure la Loi sur l’éducation, dans une optique de transmission aux nouvelles générations.

«  Par exemple, sous la Charte [canadienne des droits et libertés], les francophones peuvent faire une demande afin d’envoyer leurs enfants à une école de langue française. Il faudrait générer le même type de droit pour les autres communautés linguistiques du territoire », a suggéré M. Johnson, pour ensuite demander au ministre s’il est prêt à créer un droit à l’accès aux écoles autochtones sur le territoire.

« Il est reconnu que le gouvernement TNO doit en faire plus pour mettre les langues autochtones de l’avant, a acquiescé le ministre. [...] Le ministère encourage aussi le comité sur les opérations gouvernementales à mettre de l’avant ses recommandations en matière d’éducation. Nous reconnaissons que les lois sur les langues officielles et sur l’éducation agissent de paire. »

Apport de la commissaire aux langues

La présidente du comité sur les opérations gouvernementales et députée de Thebacha, Frieda Martselos, a suggéré en chambre, le 3 novembre, que le comité pourrait transposer les recommandations émises par la commissaire aux langues sortante, Shannon Gullberg, dans sa propre liste de recommandations.

« Habituellement, le comité étudie le rapport de la commissaire puis émet ses propres recommandations à l’Assemblée. Or, cette année, le comité va prendre en compte les recommandations émises par la Commissaire au sujet de la Loi sur les langues officielles comme partie intégrante de sa révision », a-t-elle annoncé.

Mme Martselos fait ici référence au Rapport annuel 2016-1017 de la commissaire aux langues dans lequel Mme Gullberg suggère de nombreux amendements à la Loi, notamment, d’élargir l’offre de service en langues autochtones dans les collectivités, en fonction des priorités émises dans le cadre d’un processus de consultation.

« Des services de base doivent être disponibles dans toutes les langues officielles, peu importe la région, peut-on lire dans ce rapport. Les services de base doivent inclure les services de santé, et les services liés aux inscriptions obligatoires, aux permis et à la sécurité, ainsi que ceux considérés comme essentiels par la législation. D’autres services pourraient être disponibles en fonction des régions linguistiques désignées établies dans les règlements. Toute tentative de limiter les services en fonction de régions linguistiques désignées devrait se faire en collaboration avec les communautés linguistiques. »

La loi actuelle prévoit, pour les neuf langues autochtones du territoire, des droits distincts de ceux prévus pour le français et l’anglais. Essentiellement, la Loi suggère que les service gouvernementaux en langues autochtones ne sont nécessaires que dans certaines régions désignées.

Mme Gullberg a comparu le 26 octobre devant le comité sur les Opérations gouvernementales. « La Loi sur les langues officielles des TNO n’est pas adaptée au Nord, y a-t-elle alors déclaré. On ne peut pas garder une législation qui place [les langues autochtones] au second plan. »

La piètre qualité des services d’interprétation dans les langues autochtones couvertes par la loi représente à ses yeux l’un des éléments qui illustrent le mieux les lacunes de la législation.