Le premier congrès canadien sur l'hydrogène avait lieu à Edmonton cette semaine. Le premier ministre de l'Alberta Jason Kenney et le ministre des Ressources naturelles Jonathan Wilkinson étaient sur place.
À Edmonton et dans les environs de Calgary, le gouvernement provincial souhaite y construire des usines qui produiront de l'hydrogène. C'est une énergie qui, lorsqu'elle est utilisé comme combustible, n'émet pas de gaz à effet de serre.
Avec le plan de réduction des gaz à effet de serre provenant des industries pétrolières et gazières du gouvernement fédéral, qui vise à les réduire de 40% d'ici 2030, la province semble vouloir se tourner vers une nouvelle énergie.
David Layzell, professeur en sciences biologiques de l'Université de Calgary, explique pourquoi la province se tourne vers l'hydrogène et si cela est bon pour l'environnement ici :
L'entrevue a été réalisée en anglais. Voici la traduction en français. Les questions sont en caractère gras et les réponses en italique.
Pourquoi l’Alberta est-elle intéressée à l’hydrogène aujourd’hui?
Je crois que toutes les provinces canadiennes ainsi que plusieurs pays dans le monde sont intéressés à passer à des sources d’énergie qui, lorsqu’elles sont utilisées, ne produisent pas d’émissions de gaz à effet de serre (GES). L’hydrogène aidera la province à réduire son impact environnemental associé aux systèmes énergétiques. L’Alberta est un producteur majeur des vecteurs d’énergie à base de carbone comme par exemple, l’essence, le diésel, le carburant pour avions et le gaz naturel. L’hydrogène est un combustible qui, lorsqu’il est consumé, ne produit pas d’émissions de gaz à effet de serre. Il produit plutôt de la vapeur d’eau.
Pourquoi l’Alberta n’a-t-elle pas investi dans cette énergie plus tôt?
C’est assez dispendieux et il n’y a pas de système de production pour cette énergie de construit jusqu’à présent. Il y a beaucoup d’hydrogène qui est produit dans l’Ouest canadien, 70% en Alberta. Il est utilisé pour fabriquer des fertilisants, de l’ammoniac, des produits chimiques, du plastique et pour augmenter la qualité du pétrole raffiné, comme l’essence ou le diésel. L’Alberta sait comment produire de l’hydrogène, mais elle est créée pour une utilité différente à celle que l’on veut utiliser, c’est-à-dire à titre de combustible. Le concept maintenant est de produire un système énergétique à l’hydrogène qui servira de carburant pour les gros camions, les trains, les avions et les bateaux. Pour ces transports, l’électrification n’est pas possible ou n’est pas réaliste. L’hydrogène peut servir également de chauffage dans une maison ou générer de l’électricité.
Pourquoi l’Alberta est-elle la province qui produit le plus cette énergie?
La matière première pour fabriquer de l’hydrogène est le gaz naturel. Le gaz naturel est quelque chose que l’on retrouve en abondance ici et c’est peu dispendieux. Pour éviter d’émettre des émissions de gaz à effet de serre pour produire l’hydrogène, il faut s’occuper de capter le carbone émis et de le séquestrer. Pour être séquestré, le carbone peut être placé dans les bassins sédimentaires dans le nord de la Colombie-Britannique, de l’Alberta ou dans le sud de la Saskatchewan. Ceci préviendra l’échappement de ces gaz dans l’atmosphère.
Le fait d’être le grand producteur d’hydrogène au Canada a-t-il un rapport sur le fait qu’il est peu dispendieux ici?
Oui, parce que l’on peut profiter du gaz naturel en abondance ici, donc c’est la raison pourquoi c’est moins cher. Au Québec, c’est l’endroit le moins cher où produire de l’hydrogène provenant de l’eau électrolysé, parce qu’ils ont de l’eau et des cours d’eau en abondance. Chaque province a leur particularité de ressources pour en produire.
Le gouvernement veut construire des usines à Edmonton et près de Calgary pour faire de l’hydrogène. Comment serait produit de l’hydrogène dans une usine?
La plupart des usines seront des reformeurs de vapeur de méthane et prendront le gaz naturel pour le fusionner avec de la vapeur (Méthane + Eau = Hydrogène). En plus, du dioxyde de carbone sera également produit. Plusieurs acres seront nécessaires pour une usine de ce genre. Entre 400 et 800 tonnes d’hydrogène y sont produites par jour. L’idée est de produire le plus d’hydrogène possible et cela sera fait par le secteur privé. Un autre objectif sera de réduire l’intensité de la fabrication de produits industriels, comme le carbone utilisé dans les fertilisants et réduire les produits pétroliers. L’hydrogène sera également représenté dans des actions boursières industrielles. Ce serait ça le plan à court terme des usines. Les autres choses pour faire vendre le marché seraient de faire grandir la demande en faisant des camions à hydrogène, des trains à hydrogène et des autobus à hydrogène.
Croyez-vous que cela va remplacer l’industrie pétrolière et gazière?
Au début, il va penser à différentes façons de produire cette nouvelle énergie. Au Canada, 48% des émissions de gaz à effet de serre proviennent de la combustion de l’essence, du diésel, du carburant pour avion et du gaz naturel. Il faut arrêter ces secteurs si l’on veut diminuer nos émissions de GES. Les opportunités qui s’offrent à nous pour cesser nos émissions de GES sont l’électrification, l’hydrogène et les biocarburants. Le problème avec l’électrification est qu’il est difficile de faire des autobus ou des véhicules lourds qui fonctionnent à l’électricité. Pour l’hydrogène, il faut s’assurer que le procédé ne produit pas de GES.
Dans une entrevue avec un candidat du Parti vert du Canada, pendant la campagne électorale, en automne dernier, il m’avait dit que l’hydrogène ou du moins l’hydrogène bleu n’était pas bon pour l’environnement. Est-ce vrai?
Ce qu’il faut porter attention, c’est l’intensité de la production de carbone. C’est pareil du côté de l’électricité au Canada. Pour faire de l’électricité, des énergies basées sur le carbone sont souvent utilisées. En tant que société, nous devons reconnaître que nous n’avons pas tant d’options que cela en termes de vecteurs d’énergie. Nous avons tous besoin des porteurs d’énergies, mais nous devons trouver une façon de produire des énergies qui ne produisent pas des émissions de carbone. Heureusement, l’électricité et l’hydrogène sont deux vecteurs dont leurs façons de produire l’énergie peuvent être interchangeables. C'est-à-dire que si nous sommes à court d'électricité et que nous avons de l'hydrogène, il est possible de faire de l'électricité avec de l'hydrogène. L'inverse s'applique également. Avec de l'électricité, il est possible de faire de l'hydrogène.