Il y a maintenant un an que la nouvelle mouture de la Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée a été adoptée. Pourtant, quelques mois avant son entrée en vigueur, les ressources ne seraient toujours pas en place pour que le gouvernement s’y conforme.
Le GTNO ne serait donc pas prêt pour l’entrée en vigueur prochaine des modifications à la Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée, prévues dans le projet de loi 29.
« J’ai constaté un déclin croissant des capacités à traiter les problèmes liés à la protection de la vie privée au sein des organismes publiques», a indiqué la commissaire à l’information et à la vie privée des TNO, Elaine Keenan Bengts.
C’est de cette manière que la commissaire a lancé l’examen public de son rapport annuel 2018-2019 qui s’est déroulé le 15 mai auprès des députés membres du Comité permanent des opérations gouvernementales, c’est-à-dire les députés réguliers.
Des délais inatteignables
Selon la commissaire, lorsque la nouvelle loi entrera en vigueur, le bureau du Commissariat à l’information et à la vie privée ne sera pas en mesure de respecter les délais de traitement prescrits. Le nombre de dossiers à traiter devrait alors s’accroitre « de manière exponentielle ».
En effet, tous les organismes publics seront désormais obligés de révéler à la commissaire toute brèche dans la protection de la vie privée. Présentement, seul le ministère de la Santé et des Services sociaux y est tenu.
Or, son bureau croule déjà sous les dossiers. La commissaire dit en avoir ouvert 154 en 2019-2020, soit près du double de la période 2018-2019 durant lequel on avait traité 84 dossiers. On explique cette augmentation par le fait que la Loi sur les renseignements sur la santé rend désormais obligatoires les notifications de toutes infractions.
Qui plus est, les examens des dossiers par le bureau de la commissaire devront dorénavant être terminés en 90 jours plutôt qu’en 180 jours. « L’accroissement de la charge de travail pour ma petite équipe est toujours une préoccupation. Il m’a fallu 18 mois pour faire l’examen des dossiers cette année, alors que 6 mois m’étaient accordés », a-t-elle indiqué. Quatre nouveaux employés ont été réclamés au GTNO; une embauche a été confirmée.
Accès à l’information
Sur le plan de l’accès à l’information, Mme Keenan Bengts a affirmé que si les organismes gouvernementaux divulguaient volontairement l’information réclamée, sa charge de travail pourrait être réduite « de 50 %… peut-être même plus ». Un enjeu qui a été porté en Chambre par le député de Yellowknife Nord, Rylund Johnson, le 29 juin.
« Je crois qu’une culture aux TNO porte les organisations à employer la Loi sur l’accès à l’information comme un écran protecteur, en y contraignant les journalistes afin de les détourner de l’information voulue », a lancé le député. Ce dernier a souligné plusieurs manquements du GTNO, rapportés par les médias et le public durant la période de confinement.
À l’heure actuelle, le partage de l’information du GTNO est centralisé au ministère des Finances, sous la division du service de Système de partage de l’information. « Je ne ferai pas de (la ministre des Finances) la ministre de la transparence et de l’imputabilité, mais par défaut, elle occupe en fait ce poste », a déclaré la première ministre. Elle a également assuré que cette division élabore présentement une approche formalisée qui facilitera l’accès en ligne aux documents gouvernementaux, afin que le GTNO respecte ses obligations de divulgation proactive.
Manque d’expertise aux ministères
Selon Mme Keenan Bengts, le GTNO devra d’abord pallier le manque d’expertise au sein des organismes publics en matière de protection de la vie privée et d’accès à l’information. La commissaire a dévoilé que le ministère des Finances a vu passer trois coordonnateurs à l’information et à la vie privée en seulement huit mois. « C’est le ministère qui a sans doute reçu le plus de demandes d’accès à l’information », a souligné la commissaire.
La commissaire approuve aussi une suggestion émise par le GTNO pour la création d’un bassin d’expertise cohérent et centralisé entre les ministères. « Le gouvernement a pensé centraliser l’expertise en matière de vie privée et d’information. Ce n’est pas une mauvaise idée, a-t-elle affirmé. Cette nouvelle législation a besoin d’un noyau d’experts au sein du gouvernement. Par contre, je vous garantis que ce n’est pas une expertise qui est facile à acquérir », a ajouté Mme Keenan Bengts.
Des dossiers de santé non protégés
La commissaire pointe également un manque criant de connaissances chez les professionnels de la santé quant à la confidentialité des informations médicales des patients. Deux plaintes traitées par la Commission ont d’ailleurs été médiatisées au cours des derniers mois.
Les ressources requises pour protéger l’information médicale des patients en conformité à la loi ne seraient toujours pas en place. Mme Keenan Bengts a offert un exemple tiré d’un cas vécu à Inuvik. « L’employé de la clinique, qui est également un patient, a exigé à plusieurs reprises que son dossier soit protégé des autres employés, mais ça n’a jamais été fait. On nous a expliqué que le système électronique actuellement en place n’est pas en mesure de le faire. C’est contraire à la loi, et quelque chose doit être fait. »
Elaine Keenan Bengts, qui cumule 23 années en tant que commissaire à l’information et à la protection de la vie privée, a annoncé qu’elle ne renouvèlera pas son mandat cette année.